Etat des connaissances

Définitions, sources, expositions et effets sur la santé

Dans notre vie quotidienne, nous sommes exposés à une grande variété de produits chimiques présents dans de nombreux produits de consommation, tels que les équipements électroniques et les plastiques, qui entrent dans nos aliments et notre eau de boisson. La plupart de ces produits chimiques sont présents à de très faibles concentrations. Cependant, même de faibles doses de substances perturbant les hormones du corps, appelées perturbateurs endocriniens peuvent avoir des effets biologiques importants pendant les périodes critiques de sensibilité.

Concepts et définitions

Un concept relativement récent

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la biologiste Rachel Carson s’est intéressée à la disparition soudaine de certains oiseaux aux Etats-Unis. Elle expose sa théorie sur les effets négatifs des pesticides sur l’environnement, et plus particulièrement sur les oiseaux, en 1962 dans un livre intitulé « Silent Spring ».
Depuis, les observations concernant la faune sauvage se sont multipliées : troubles de la reproduction des visons américains et des loutres, contamination des gastéropodes marins (1972), développement de poissons hermaphrodites en Grande-Bretagne, micro-pénis des alligators du lac Apopka en Floride (1988), défaillances du système immunitaire des phoques gris (1987-1988) et des ours polaires (2003), disparition des abeilles (2012), etc. Afin de partager leurs interrogations, des scientifiques de différentes disciplines se sont réunis lors de la Conférence de Wingspread en 1991. Ils conjecturent un lien entre les altérations de la reproduction des animaux et celles observées chez une partie de la population humaine et comparent les effets de certains polluants chimiques chez l’animal à ceux observés chez les femmes traitées par le Diéthylstilbestrol (médicament prescrit pour éviter des avortements spontanés, commercialisé en France sous le nom de Distilbène et interdit dans les années 1970), tels que l’augmentation de la fréquence des malformations congénitales et des cancers, et la baisse de la fertilité. L’expression « endocrine disruptors » est alors utilisée pour la première fois.
Depuis, de nombreuses équipes de recherche ont démontré que cette notion de perturbateur endocrinien peut être associée à un large spectre de substances chimiques, avec des répercussions variables selon la substance, le moment de l’exposition, les co-expositions (expositions à plusieurs substances en même temps) et la dose. Les méthodologies permettant d’étudier spécifiquement les effets des perturbateurs endocriniens connaissent d’importants développements actuellement, ce qui permet à la recherche d’évoluer et de mettre en évidence de nouveaux résultats.
La recherche sur ce sujet s’est par ailleurs peu à peu structurée, notamment en France (cf. Programme national de recherche spécifiquement consacré aux perturbateurs endocriniens). Aucun consensus international sur une définition Les perturbateurs endocriniens sont des substances étrangères à l’organisme qui sont susceptibles d’interférer avec le fonctionnement du système endocrinien.

Définition

La définition la plus communément admise est celle proposée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2012 (OMS/UNEP 2012) : « Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange exogène altérant les fonctions du système endocrinien et induisant donc des effets nocifs sur la santé d’un organisme intact, de ses descendants ou sous-populations ».

Toutefois, il n’y a pas aujourd’hui de consensus international sur une définition des perturbateurs endocriniens.

Mécanisme de perturbation

Le système endocrinien regroupe les organes qui sécrètent des hormones : thyroïde, ovaires, testicules, hypophyse… Il constitue le principal lien de communication et de contrôle entre le système nerveux et les fonctions corporelles telles que la reproduction, l’immunité, le métabolisme et le comportement. Le système endocrinien est basé sur des messagers chimiques, les hormones, qui sont sécrétées dans le sang (ou d'autres liquides extracellulaires) et peuvent atteindre toutes les parties du corps.

Certaines substances chimiques peuvent agir sur le système endocrinien de plusieurs façons.

  • Elles peuvent imiter l'activité biologique d'une hormone en se liant à un récepteur cellulaire, entraînant une réponse injustifiée ;
  • Elles peuvent se lier au récepteur mais ne pas l'activer ;
  • Enfin, elles peuvent interférer ou bloquer la fabrication ou le contrôle des hormones naturelles ou de leurs récepteurs, par exemple en modifiant leur métabolisme. En découle un certain nombre de conséquences potentielles pour l'organisme : altération des fonctions de reproduction, malformation des organes reproducteurs, développement de tumeurs au niveau des tissus producteurs ou cibles des hormones (thyroïde, sein, testicules, prostate, utérus…), perturbation du fonctionnement de la thyroïde, du développement du système nerveux et du développement cognitif, modification du sex-ratio (diminution du nombre de naissance masculine)...

Sources

Sources des perturbateurs endocriniens

Le nombre de substances considérées comme des perturbateurs du système endocrinien est large et varié, qu'elles soient d’origine naturelle ou synthétique.

Les produits chimiques et sous-produits industriels constituent une source importante de perturbateurs endocriniens qui peuvent interférer avec le système endocrinien de l'homme ou de l'animal. Ils représentent, à l'heure actuelle, plus d'un millier de produits de nature chimique variée.

Parmi les plus fréquents, on peut citer les produits de combustion comme les dioxines, les furanes, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et les produits industriels ou domestiques comme :

  • les phtalates, ou les bisphénols utilisés dans les plastiques,
  • les parabènes, des conservateurs utilisés dans les cosmétiques,
  • les organochlorés (DDT, chlordécone…) utilisés dans les pesticides,
  • l'étain et ses dérivés utilisés dans les solvants.

Ainsi, on trouve des perturbateurs endocriniens dans de nombreux produits de la vie quotidienne, notamment les bouteilles en plastique, les boîtes de conserve métalliques, les détergents, les retardateurs de flamme, les aliments, les jouets, les cosmétiques et les pesticides.

 

Tableau 1. Principales sources et substances signalées comme perturbateurs du système endocrinien

Sources d’émission

Famille chimique

Exemples de perturbateurs endocriniens

Incinération,
mise en décharge

Composés polychlorés (issus de la production industrielle ou de sous-produits de substances pour la plupart interdites)

Dioxines polychlorées, biphényles polychlorés

Ruissellement agricole / transport atmosphérique

Pesticides organochlorés (présents dans les insecticides, dont beaucoup sont maintenant interdits)

DDT, dieldrine, lindane

Ruissellement agricole

Pesticides actuellement utilisés

Atrazine, trifluraline, perméthrine

Effluents industriels et municipaux

Alkylphénols (présents dans les shampoings par exemple)

Nonylphénol

Effluent industriel

Phtalates (trouvés dans les plastifiants)

Phtalate de dibutyle, phtalate de butylbenzyle

Effluent municipal
Ruissellement agricole

Hormones naturelles (produites naturellement par les animaux);stéroïdes synthétiques (trouvés dans les contraceptifs)

Estradiol, estrone et testostérone; éthynylestradiol

Effluents des usines de pâte à papier

Phytoestrogènes (trouvés dans le matériel végétal)

Isoflavones, lignanes, coumestans

Produits de consommation

Produits cosmétiques, produits de soins personnels, produits de nettoyage, plastiques

Parabènes, phtalates, éthers de glycol, parfums, cyclosiloxanes, bisphénol A (BPA)

Mousse pour les mobiliers, tapis, équipements électroniques

Retardateurs de flamme

Polybromodiphényls (PBDE)

Source : Endocrine Disruptors Update, 2000, Environment Canada, and Endocrine Disruptors and Asthma-Associated Chemicals in Consumer Products. R.E. Dodson, M. Nishioka, L.J. Standley, et all. (2012). « Environment Health Perspective ». Vol. 120, No. 7, pages 935-943

Expositions

Spécificités des perturbateurs endocriniens et expositions

Du fait de leur omniprésence, la population est largement exposée aux perturbateurs endocriniens. Les périodes prénatale et périnatale, la petite enfance, l'enfance et la puberté sont des âges de la vie critiques du développement au cours desquels les systèmes en voie de maturation sont particulièrement sensibles aux perturbations hormonales (Monika Beszterda, 2018) (Vasilios Pergialiotis, 2017).

L’étude sur la cohorte ELFE (Santé Publique France, 2017) fournit des données préoccupantes sur l’imprégnation par les polluants de l’environnement d’un groupe de 4 145 femmes enceintes : au moins un composé perfluoré a été retrouvé chez chacune d’entre elles ; toutes présentent des traces de pesticides pyréthrinoïdes, de PCB et des retardateurs de flamme bromés ; chez 99,6% d’entre elles ont été détectés des résidus de phtalates ; chez 70% du BPA et chez 50% des pesticides organophosphorés.

Faible dose et effet non monotone
Classiquement, les effets des substances chimiques sont décrits comme suivant une courbe dose-réponse monotone (ou linéaire). En d’autres termes, plus la dose est forte, plus l’effet est important. Cependant, les perturbateurs endocriniens sont suspectés de ne pas répondre à ce principe et pourraient provoquer, à de faibles doses, des effets plus significatifs, voire opposés à ceux observés à fortes doses. Ceci explique que les réponses à ces substances suivent des courbes non monotones (en forme de « U » inversé ou non) Ce type de courbe suggère notamment des phénomènes de saturation des récepteurs hormonaux, des mécanismes de rétroaction et autres mécanismes d’action multiples.

Fenêtre d’exposition
Depuis « l’affaire du Distilbène », il a été mis en évidence que les perturbateurs endocriniens pouvaient agir d’une façon dépendante du temps, ce qui signifie qu’une maladie adulte peut avoir une origine fœtale. D’une manière plus générale, des travaux montrent qu’à certaines périodes critiques (période prénatale, périnatale, puberté…), l’organisme serait particulièrement sensible à certaines substances. Les effets pourraient apparaître beaucoup plus tard. On parle alors de « fenêtre d’exposition » et de « période de latence ».

Effet sur la descendance
Les recherches réalisées sur plusieurs lignées animales ou humaines démontrent que les effets des perturbateurs endocriniens sont susceptibles de ne pas se cantonner aux parents exposés et de se transmettre aux générations suivantes.

Effet de mélanges
Peu d’études ont abordé jusqu’à présent la problématique des effets de mélanges complexes. De manière générale, lorsque des substances ont le même mécanisme d’action, on s’attend à ce que leurs effets s’additionnent. Cela signifie que, si plusieurs molécules sont présentes, l’exposition à prendre en compte est la somme des expositions à ces substances. Dans le cas des perturbateurs endocriniens qui appartiennent à des catégories différentes (avec des mécanismes d’action distincts), les effets sont moins prévisibles. L’approche historique des travaux sur la toxicité était fondée sur la mesure ou le suivi d’un composé isolé. Depuis, les méthodes pour étudier les effets et l’exposition évoluent pour prendre en compte des situations plus proches de la réalité, c’est-à-dire une exposition simultanée à des mélanges de polluants environneme

Effets sur la santé

Chez les animaux sauvages, il a été clairement démontré que les perturbateurs endocriniens provoquaient des anomalies dont une altération des performances de reproduction de certaines espèces. Ils sont associés à des modifications de l’immunité et du comportement ainsi qu’à des malformations du squelette.

Chez l'homme, il a été suggéré que les perturbateurs endocriniens étaient responsables d’une diminution du nombre de spermatozoïdes, d’une augmentation du nombre d'enfants de sexe masculin nés avec des malformations génitales et d’une augmentation de l'incidence de certains types de cancer connus pour leur sensibilité aux hormones. Plus controversés, des liens ont été suggérés avec une altération du développement du système nerveux central et du comportement sexuel. Les effets sur la santé des perturbateurs endocriniens dépendront des facteurs suivants :

  • la spécificité du perturbateur impliqué,
  • le niveau d'exposition,
  • le temps d'exposition (heures, jours, années),
  • l'état de santé de l'individu exposé.

Cancers

Les perturbateurs endocriniens sont suspectés d’être à l’origine d’une augmentation observée dans de nombreux pays de certaines pathologies pour lesquelles l’environnement pourrait en être, pour partie, à l’origine. Il s’agit notamment des cancers hormonodépendants : cancers de la prostate, du sein, de l’ovaire et de la thyroïde (Ayman E. Shafei 2017) (Zuccarello 2018) (W. A. Wolff MS 1997) (Ayman Shafei 2018) (PACA 2018) (Ying Hu 2017) (Samtani 2017).

Reproduction chez l’homme

Il existe des preuves que les anomalies congénitales de l'appareil reproducteur masculin (cryptorchidie, hypospadias) pourraient avoir augmenté dans certains pays au cours des dernières décennies (JianXing 2017) (S. N. Main KM 2010). Une des principales hypothèses concernant un ensemble d'affections liées chez les hommes exposés aux perturbateurs endocriniens in utero est le syndrome de dysgénésie testiculaire qui désigne un certain nombre de troubles de la reproduction de gravité variable : une faible qualité du sperme (DOROTA ZAMKOWSKA 2018), la crytorchidie, l’hypospadias et le cancer du testicule (R.-D. M. Skakkebaek NE 2001) (Giwercman A 1998) (R.-D. M. Skakkebaek NE 1998) (McLachlan JA 1998).

Les preuves d'une perturbation endocrinienne généralisée chez les hommes sont donc alimentées par des informations indiquant des baisses séculaires importantes de la qualité du sperme (E. E. Swan SH 2000) (R.-D. M. Skakkebaek NE 1998) (Giwercman A 1998) (Carlsen E 1995) et de la testostérone (Travison TG 2007), ainsi que des taux accrus de cancers du testicule (Huyghe E 2003) chez les hommes au cours des 50 dernières années. Dans le cadre de la stratégie nationale contre les perturbateurs endocriniens (SNPE) et du Plan santé environnement 3, Santé publique France réalise une surveillance d’indicateurs de la santé reproductive liés à l’exposition aux perturbateurs endocriniens. Celle-ci a montré une détérioration globale de la santé reproductive chez l’homme depuis les années 1990 (Santé publique France 2018). Plusieurs études ont évalué les relations entre les perturbateurs endocriniens, en particulier les POP, et les anomalies congénitales des organes génitaux de l'homme, avec des résultats peu convergents (Wigle DT 2008) (S. N. Main KM 2010).

Une vaste étude cas-témoins (471 cas et 490 sujets témoins) a révélé une augmentation significative du risque d'hypospadias associé à une exposition à la laque et aux phtalates, dont certains sont antiandrogènes (Ormond G 2009).

Une étude américaine a révélé une réduction de la distance anogénitale (marqueur de l’androgénisation fœtale insuffisante), de la taille du pénis et de la descente testiculaire incomplète chez 106 garçons âgés de 2 à 24 mois en relation avec plusieurs métabolites de phtalates urinaires mesurés dans l’urine maternelle du troisième trimestre (Swan SH 2008). Ainsi, il semble que les phtalates et peut-être d'autres perturbateurs endocriniens altèrent le développement précoce de la reproduction masculine, mais des études supplémentaires sont nécessaires.

Evolution de l’âge de la puberté

Une réduction de l'âge du début de la puberté et une fréquence accrue de puberté précoce ont été observées au cours des deux dernières décennies dans plusieurs pays (Euling SY 2008) (Aksglaede L 2009) (Herman-Giddens M 1997). Ces tendances sont considérées comme un problème de santé publique important car la puberté précoce est un facteur de risque de maladies liées au système endocrinien à l’âge adulte. Les tendances ne peuvent pas être entièrement expliquées par des facteurs de risque connus (conditions de vie, indice de masse corporelle) et l'hypothèse a été émise que l'exposition aux perturbateurs endocriniens contribuerait de manière significative (Mouritsen A 2010) (Schoeters G 2008).

Des études supplémentaires sur l'exposition aux perturbateurs endocriniens et le développement de la puberté sont nécessaires en raison du manque actuel de données humaines.

Maladies neurodégénératives

Les troubles du développement neurologique (maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson notamment) sont des pathologies de plus en plus fréquentes. Bien qu'il soit probable que ces tendances soient attribuables à de nombreux facteurs, notamment des changements dans les pratiques de diagnostic, il existe de plus en plus de preuves que l'exposition aux perturbateurs endocriniens pourrait jouer un rôle important. Des études longitudinales et transversales sur l’homme ont montré une relation entre une exposition aux perturbateurs endocriniens, tant in utero que pendant la petite enfance, et des troubles du développement neurologique tels que la diminution du QI, la perte de mémoire, le déficit de l'attention / hyperactivité et autres problèmes de comportement (Miodovnik A, 2011). Ces données sont les plus robustes pour les PCB (Korrick SA, 2008) et les pesticides (Rosas LG, 2008) et certains phtalates. Les hormones thyroïdiennes jouent également un rôle essentiel dans le développement neurologique en plus de nombreuses autres fonctions liées à la croissance et au métabolisme. Les taux de dysfonctionnement de la thyroïde ont augmenté au cours des dernières décennies (Harris KB, 2007). En parallèle, une liste de perturbateurs endocriniens capables d’altérer la fonction thyroïdienne s’accroit. Des études menées chez l'homme et chez l'animal suggèrent que les PCB, les PBDE, les pesticides, les phtalates, le BPA et de nombreux autres perturbateurs pourraient troubler la signalisation thyroïdienne par divers mécanismes (Boas M, 2011) (Miller MD, 2009).

Obésité

La prévalence du surpoids et de l'obésité augmente rapidement dans le monde (Wang Y, 2006) (La Merrill M, 2011). Outre les « obésogènes » que sont l’alimentation, l’activité physique et la génétique, l'environnement peut jouer un rôle dans ces tendances. Les obésogènes sont définis comme des produits chimiques qui modifient de manière inappropriée l'homéostasie lipidique afin de favoriser l'adipogenèse et l'accumulation de lipides. Des études expérimentales montrent que de nombreux produits chimiques peuvent provoquer ces effets (Doke, 2018) (La Merrill M, 2011) (Grün F, 2009). Les études humaines sur l’obésité liée à des expositions environnementales chez les enfants font défaut. Elles se limitent principalement aux études sur les POP et les résultats sont incohérents (La Merrill M, 2011) (Hatch EE, 2010). Par ailleurs, deux études ont rapporté des associations positives entre certains phtalates et l'IMC chez les filles (Hatch EE, 2010) (T. S. Wolff MS, 2007). Des recherches complémentaires sont nécessaires pour mieux évaluer si l'exposition aux perturbateurs endocriniens des enfants est associée à l'obésité et aux affections associées (syndrome métabolique, diabète et maladies cardiovasculaires futures).

Diabète

On reconnaît de plus en plus que certains perturbateurs endocriniens pourraient augmenter le risque de développer des troubles métaboliques tels que le diabète de type 2 (Ruiz D, 2018). Le mécanisme principal d’action serait une perturbation de l’équilibre glucidolipidique. Elle entraînerait une résistance à l’insuline, laquelle pourrait ensuite mener au diabète. Les phtalates et le BPA en particulier sont mis en cause dans certains travaux comme facteurs de risque de résistance à l’insuline.

Principaux perturbateurs endocriniens

Polluants organiques persistants (POP)
Les polluants organiques persistants (POP) sont des substances chimiques qui se bioaccumulent dans la chaîne alimentaire. Elles comprennent les biphényles polychlorés (BPC), les pesticides organochlorés (DDT par exemple), les éthers diphényliques polybromés (PBDE) et des retardateurs de flamme au brome.
Les PCB sont une classe de produits chimiques largement utilisés comme transformateurs et fluides hydrauliques et comme additifs dans les peintures, les huiles et les matériaux de construction (Centers for Disease Control and Prevention, 2010).
Le DDT et d'autres pesticides organochlorés étaient largement employés après la Seconde Guerre mondiale.
Les PCB et certains des pesticides organochlorés les plus utilisés ont été interdits dans les pays industrialisés dans les années 1970.
Les PBDE et autres retardateurs de flamme se trouvent dans les meubles, les supports de tapis, les appareils électroniques et de nombreux autres produits de consommation (Centers for Disease Control and Prevention, 2010). En raison de l'omniprésence des POP dans l'environnement et de leur persistance, l'exposition humaine peut durer des décennies après la fin de leur utilisation.
Les expositions continues aux PCB et au DDT dans les pays qui en ont interdit l'utilisation se produisent principalement par le biais de l’alimentation (produits laitiers, viande et poisson).

Phtalates
Les phtalates sont utilisés en tant que plastifiants pour rendre les matériaux plus flexibles et en tant qu'agents stabilisants. Ils peuvent être présents dans une vaste gamme de produits. Les phtalates de faible poids moléculaire se retrouvent dans les produits de soins personnels, certains compléments alimentaires, certains médicaments et autres biens de consommation.
Les phtalates de haut poids moléculaire composent par exemple le polychlorure de vinyle souple (PVC) que l'on trouve dans les produits de consommation courante, les emballages alimentaires, les articles d'ameublement et autres matériaux de construction. Les équipements médicaux peuvent également contenir des phtalates et des expositions élevées ont été documentées chez les nourrissons d’une unité de soins intensifs néonatals (Green R, 2005). En raison de leur utilisation répandue, les métabolites urinaires des phtalates sont présents chez pratiquement tout le monde (Centers for Disease Control and Prevention, 2010). Plusieurs phtalates sont antiandrogènes et dans une étude portant sur des animaux, des effets indésirables importants sur le développement de la reproduction et autres effets secondaires à fortes doses ont été démontrés (Foster PM, 2006). Dans les études humaines, les phtalates ont été liés à une diminution des stéroïdes sexuels et des niveaux d'hormones de la thyroïde, la mauvaise qualité du sperme, l'endométriose, la résistance à l'insuline, l'obésité, et probablement le cancer du sein (S. S. Meeker JD, 2009) (F. K. Meeker JD, 2012). Les individus sont exposés aux phtalates en ingérant des aliments ayant été en contact avec des récipients et des produits contenant des phtalates. L'exposition peut dans une moindre mesure être due à l'inhalation d'air contenant des vapeurs de phtalates ou de poussières contaminées. (PACA, 2018).

Bisphénol A
Le bisphénol A (BPA) est un produit chimique très répandu utilisé dans la fabrication de plastiques polycarbonates, de résines époxydes et de papier thermique (Huang, et al., 2018). Comme pour les phtalates, le matériel médical peut également contenir du BPA (Calafat AM, 2009).
Par ailleurs, l'exposition au BPA se produit principalement par le biais de l'alimentation, et des niveaux mesurables de BPA peuvent être trouvés chez la plupart des gens (Centers for Disease Control and Prevention, 2010). L’exposition à ces substances se fait également par voie aérienne et cutanée.
Le BPA, présent dans les emballages et les contenants, migre vers les aliments et boissons. Ce phénomène s’accroit sous l’effet de la chaleur et de leur usage répété. Son utilisation est interdite dans les biberons en polycarbonate depuis 2011.
En France, le BPA a été interdit à partir du 1er janvier 2013 dans les matériaux en contact avec les aliments destinés à être utilisés par les enfants. Le 1er janvier 2015, une deuxième phase de l'interdiction du bisphénol A (BPA) par la France est entrée en vigueur. Une loi interdit l'utilisation du BPA dans tous les emballages, récipients et ustensiles destinés à entrer en contact direct avec les aliments.
La loi française est plus restrictive que la législation européenne. Ainsi, en vertu du règlement européen sur les plastiques (UE) n° 10/2011, le BPA est autorisé à être utilisé dans la production de plastiques avec une limite de migration spécifique de 0,6mg/kg de produit alimentaire.

Pesticides utilisés actuellement
En raison des problèmes environnementaux liés aux pesticides organochlorés persistants, presque tous les pesticides utilisés aujourd'hui sont non persistants. Bien qu’ils soient conçus pour se décomposer en quelques heures ou quelques jours, il a été prouvé que de nombreux pesticides non persistants peuvent rester pendant des années dans les maisons et autres intérieurs où ils sont protégés de l’humidité, de la lumière solaire et d’autres mécanismes de dégradation. Nombre d’entre eux, couramment utilisés sont également des perturbateurs endocriniens connus ou soupçonnés.

Parabènes
Les parabènes sont des conservateurs très répandus dans les cosmétiques, ainsi que dans les aliments et les médicaments. L’exposition se produit par voie alimentaire et percutanée.

Alkylphénols
Ils sont employés dans la fabrication d'adhésifs, de peintures, d'émulsions de cires pour parquet, de produits ménagers et désinfectants. Il sont aussi présents dans des matériaux de construction ou encore dans l'industrie des cuirs, des textiles et du bois.

Formaldéhyde (Composé organique volatil)
il est utilisé comme désinfectant ou biocide (lingettes, détergents pour vaisselle…) ou encore comme fixateurs, liants ou colles, dans des résines (produits de bricolage, revêtements de murs, sols…). On les retrouve aussi dans les sources de combustion comme la fumée de tabac, les bougies, les bâtonnets d’encens, les cheminées à foyer ouvert ainsi que les cuisinières à gaz, les poêles à pétrole… .